Succéder à l’étoilé Rozó rue la Monnaie ? Un défi relevé avec brio par le restaurant Pureté, qui affirme avec conviction son identité. Des murs à l’assiette, l’impression est forte. Quintessence de la beauté.
Surprise, transe, sourires, plaisir... La « cuisine d’émotions », revendiquée par le restaurant Pureté, avec à sa tête le chef Gérald Guille, tient toutes ses promesses.
Le rendez-vous des esthètes et des gastronomes
En poussant la porte de Pureté, vous n’entrez pas dans un restaurant, mais découvrez un univers. Chacun appréciera l’attention portée au cadre, dans ses moindres détails. Coup de cœur pour le travail de la décoratrice Annabelle Fesquet, qui a privilégié les lignes pures, les matériaux bruts, les tissus recyclés... Les tons chauds de terre cuite dominent, enveloppants. Mention spéciale aux miroirs qui ponctuent et amplifient l’espace. La graphiste culinaire Audrey Lorel signe une identité forte et pleine de sens. Les amateurs d’art de la table seront comblés par le défilé orchestré tout au long du repas. Gobelets en céramique, coquetiers insolites, assiettes originales... tout est pensé pour mettre en scène la cuisine créative et décomplexée du chef Gérald Guille. Une scénographie totale maîtrisée, qui met en joie.
Attention talents !
Pureté, c’est aussi et surtout une cuisine, spontanée, sincère, novatrice, qui sublime les produits de saison, leur saveur et leur fraîcheur. Cette cuisine est signée Gérald Guille, 37 ans, au CV impressionnant. Avant d’ouvrir son établissement dans le Vieux-Lille, cet Etaplois d’origine a fait ses armes auprès des meilleurs. D’abord Michel Roth (Bocuse d’Or et Meilleur Ouvrier de France) au Ritz, puis Marc Meurin, chef doublement étoilé. Enfin, pendant 12 ans, il a été chef adjoint du Westminster pour Le Pavillon, restaurant étoilé au guide Michelin. Parallèlement, le public l’a découvert en 2012 dans l’émission Top Chef, dont il a été le premier participant nordiste. Habitué des podiums, il a aussi été finaliste de prestigieux concours nationaux (Les Toques d’Or, Chefs en Or et Taittinger). Pour son projet lillois, il a recruté une brigade dynamique, qui partage son sens de l’engagement et sa rigueur. Son second, Thibault Dufour, avec qui il noue une belle complicité, a lui-même travaillé dans des maisons étoilées (Georges Blanc, Christophe Bacquié). Clémence Ringard, qui signe les desserts de la maison, a fait ses armes chez Thoumieux auprès de Sylvestre Wahid et vient de se voir décerner le Trophée pâtissier 2021 par le Gault & Millau, tandis que Gérald Guille a lui-même été élu dans la catégorie jeune talent. Gageons que d’autres récompenses suivront !
Festival d’émotions
La carte évolue au gré des saisons et de l’inspiration. Nous avons eu le privilège d’y vivre une expérience sensationnelle. La mise en bouche, pastèque sphérisée et couteau parfait (le coquillage), donne le ton. Nos papilles vont en voir de toutes les saveurs. Notre choix se porte sur l’œuf de poule, chou- fleur et poutargue. Le jaune est confit, le chou croque, le jus d’herbes explose, la poutargue râpée apporte la touche iodée chère au chef. Pour la suite, nous faisons confiance à Claire, qui, avec Marty, assure en salle un service sobre, bienveillant et décontracté. Ce sera donc carotte de Tilques, oseille et bonite. L’assiette est superbe. En pickles, déshydratée, en granité, crue, cuite, parfumée avec un siphon de jus d’orange, agrémentée de fanes frits, la carotte dans tous ses états nous met dans tous les nôtres. Pour le dessert, nous fondons pour la mirabelle, café, chicorée. Miracle du fruit. Poésie.